vendredi 25 septembre 2009

Schopenhauer : Moutons de Panurge...



    Voici ce qu'écrivait le génial et si agaçant Schopenhauer, à propos des "spécialistes", dans son célèbre ouvrage "L’art d’avoir toujours raison" :

"Les gens du commun ont un profond respect pour les spécialistes de tout ordre. Ils ignorent que celui qui se fait profession d’une chose n’aime pas la chose même, mais ce qu’elle lui rapporte – et que celui qui se fait profession d’une chose la connaît rarement à fond, car s’il l’étudiait à fond, il n’aurait en général plus le temps de l’enseigner."

 

Voici également son explication concernant la façon dont se constitues une opinion :

"Ce qu’on qualifie d’opinion commune est, à bien l’examiner, l’opinion de 2 ou 3 personnes ; et c’est de quoi nous pourrions nous convaincre si nous pouvions seulement observer la manière dont naît une pareille opinion commune. Nous découvririons alors que ce sont 2 ou 3 personnes qui ont commencé à l’admettre ou à l’affirmer, et auxquelles on a fait la politesse de croire qu’ils l’avaient examinée à fond ; préjugeant de la compétence de ceux-ci, quelques autres se sont mis à admettre également cette opinion ; un grand nombre d’autres gens se sont mis à leur tour à croire ces premiers, car la paresse intellectuelle les poussait à croire de prime abord, plutôt que de commencer par se donner la peine d’un examen. C’est ainsi que de jour en jour, le nombre de tels partisans paresseux et crédules d’une opinion s’est accru ; car une fois que l’opinion avait derrière elle un bon nombre de voix, les générations suivantes ont supposé qu’elles n’avaient pu les acquérir que par la justesse de ses arguments. Les derniers douteurs ont désormais été contraints de ne pas mettre en doute ce qui était généralement admis, sous peine de passer pour des esprits inquiets, en révolte contre des opinions universellement admises, et des impertinents qui se croyaient plus malins que tout le monde."

Il avait la dent dure, n’est-ce pas ? Mais attendez, ce n’est pas finit :

"Il n’est pas d’opinion, si absurde qu’elle soit, dont les hommes ne s’emparent avec empressement dès qu’on a pu les persuader que cette opinion est communément reçue. L’exemple agit sur leurs pensées comme sur leurs actes. Ce sont des moutons de Panurge, qui suivent le bélier de tête, où qu’il les mène : Il leur est plus facile de mourir que de penser."


Post Scriptum : Si vous voulez mieux comprendre ce qu'est une opinion, et comment celle-ci se constitue, je vous conseille de lire cet article sur l'un des mes autres blogs : "Qui bêle, les suive !" Petite réflexion sur l’opinion.

 


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